lundi 11 mars 2013

Démolition de la Halle : on écrit au Ministre

EN REPONSE A LA LETTRE DU MAIRE AU MINISTRE DE LA CULTURE SUR LA HALLE



Suite à l'instance de classement de la Halle du marché engagée  par le Ministre de la Culture ce mardi 5 mars 2013, principalement causée par la démolition imminente de celle-ci, le Maire de Fontainebleau a écrit au Ministre pour se "justifier" (voir à la fin de cet article). Sa lettre a été répandue par voie de tracts et de courriels en série.
Nous nous devions de rétablir la vérité et d'indiquer au Ministre notre position.


Ministère de la Culture 
et de la Communication 
Madame Aurélie FILIPPETTI, Ministre
3, rue de Valois
75001 PARIS

Fontainebleau, le 11 mars 2013

Madame le Ministre,

Par une lettre du 7 mars 2013, qu'il a souhaité rendre publique par voie de tracts, le Maire de Fontainebleau, M. Frédéric Valletoux, a cru bon de vous écrire au sujet de votre décision du 5 mars 2013 relative à une instance de classement de la Halle du Marché de Fontainebleau.

Je tiens, par ce courrier, à vous apporter quelques éléments factuels pour rétablir la réalité et répondre aux contre-vérités que le Maire vous a communiquées.

En premier lieu, contrairement à ce qu'indique le Maire, la démolition de cette Halle n'a pas reçu toutes les autorisations administratives et légales en vigueur.
En effet, le dépôt du permis de démolir, délivré le 10 octobre 2012, l'a été sans aucune autorisation du Conseil municipal. Cette autorisation était obligatoire, tant au titre des dispositions générales relatives à la gestion du patrimoine immobilier des collectivités territoriales, qu'au titre de la législation spéciale des halles et marchés.
Au surplus, je relève que le permis de démolir présente des vices d'une certaine gravité que le Tribunal administratif n'a pas encore examinés et que plusieurs requérants n'ont soulevés que postérieurement à la décision provisoire du Tribunal administratif (défaut d'autorisation par le Conseil, insuffisance de la délégation de l'adjoint ayant déposé la demande, insuffisance de l'avis de l'Architecte des Bâtiments de France au regard de l'ensemble des monuments historiques concernés …).

En second lieu, contrairement encore une fois à ce que soutient le Maire de Fontainebleau, ledit projet n'a pas été fait en concertation suffisante avec la population.
Ainsi, les conseillers de l'opposition et les associations de protection du patrimoine culturel ont été délibérément exclus du processus, en violation des articles L. 300-1 et suivants du code de l'urbanisme.
Mieux encore, le niveau d'information et d'étude auquel un tel bouleversement de notre Cité a été particulièrement bas. Je ne crois pas trahir l'impression générale en disant que le dossier était bouclé bien avant que le public puisse en prendre connaissance.
Enfin et brochant sur le tout, le Conseil municipal n'a jamais été appelé à délibérer sur le bilan obligatoire de cette soi-disant concertation, toujours en violation de la Loi.
Il est donc particulièrement scandaleux, que votre interlocuteur aimerait "que l’on respecte tout autant le résultat de la concertation qui a validé sa démolition", alors que celle-ci est inexistante.

En troisième lieu, l'avant projet voté en mai 2012, présentant soi-disant la démolition de la Halle au Conseil municipal tient de la légende urbaine.
Ainsi, j'ai demandé préalablement à la réunion de ce Conseil, communication de ce document, pourtant fondamental : le Maire n'a pas cru devoir me le communiquer. Voilà la transparence.
Plus gravement, si cela était possible, les services de l'Etat que j'ai interrogés m'ont certifié que ce document n'avait jamais été transmis au contrôle de légalité de la Sous-Préfecture de Fontainebleau. Dès lors, en admettant même qu'un tel document existât, il ne saurait être considéré comme exécutoire et a fortiori fonder la moindre autorisation de démolition.

En quatrième lieu, le Maire a tort de considérer que votre décision est tardive. A cet égard, je souligne, si vous avez attendu que les engins de chantier soient arrivés sur place pour prendre cette décision, c'est que le Maire avait officiellement annoncé que ces travaux ne prendraient place qu'en juillet 2013.
Ce n'est qu'à cette date que les mesures permettant la continuité normale du service public du marché auraient dû être prises par la municipalité. En voulant brûler les étapes, en dehors de toute concertation, le Maire a choqué nos concitoyens et risqué de mettre en péril l'équilibre économique de la Ville.

Ces éléments ayant été précisés de manière indiscutable, je tiens à la disposition de votre administration l'ensemble des pièces qui peuvent les certifier.


J'en viens maintenant au fond du projet qui a motivé la démolition de la Halle. L'accroissement de l'offre de stationnement pour renforcer l'attractivité de la Ville et accompagner le Palais National de Fontainebleau dans le développement de sa fréquentation paraît, comme le Maire le souligne, un objectif d'intérêt général.
La démolition de la Halle, outre la question de son aspect esthétique sur lequel je reviendrai, est donc directement liée à ce projet.
Cependant, la démolition de la Halle était une des alternatives permettant d'augmenter l'offre de stationnement, d'autres solutions sont parfaitement envisageables.

Le Maire a cru bon, dans des conditions discutables et sans aucune étude économique préalable, de passer un contrat de délégation de service public. Ce contrat, visiblement mal préparé, comporte cependant des clauses relatives au cas où les travaux seraient rendus impossibles, soit pour des raisons administratives, soit pour des raisons techniques. Le Maire savait pertinemment que le risque financier qu'il prenait en adoptant  "sa"  délégation aurait de graves conséquences.  Il fait semblant de découvrir celles-ci, et vous en impute la responsabilité : n'avait-il pas anticipé une telle possibilité ?

Je considère que c'était à lui de s'assurer que le processus passant du projet de travaux à sa réalisation serait sécurisé. En accumulant les erreurs préparatoires, le Maire l'a compromis.

Sur la question maintenant de l'intérêt architectural que représente cette Halle, je serai très claire : je n'appelle pas plus à son classement qu'à sa démolition, mon siège n'est fait en rien. 
La décision concernant le devenir de cet ouvrage doit reposer sur deux points fondamentaux : d'une part, l'avis des scientifiques compétents, d'autre part l'intérêt du développement de la Ville au service des Bellifontains. L'erreur du Maire de Fontainebleau a été d'ignorer totalement les premiers et de mésestimer complètement l'avis des seconds.
J'estime qu'il faudrait même faire une consultation référendaire des Bellifontains pour avoir un consensus.
J'appelle donc très clairement de mes vœux à un effort de pédagogie de votre Ministère, non seulement envers le Conseil municipal, mais encore envers les Bellifontains, pour nous expliquer ses expertises et ses préconisations.

Voilà 8 ans que M. Valletoux gère la Ville de Fontainebleau et celle-ci est considérée, à tort comme à raison, plus que jamais comme la "Belle endormie", notamment du fait de son "action".
Beaucoup de projets n'aboutissent pas, mal conçus, mal concertés, mal financés.

J'estime que votre décision doit être une chance de reprendre le projet de requalification urbaine à zéro, mais que nous ne pouvons en rester là et qu'une action définitive doit être adoptée, avec le consentement des populations et validée techniquement.

Madame le Ministre, au-delà des questions de fond, je suis extrêmement choquée par les méthodes profondément méprisantes du Maire de Fontainebleau à l'encontre des Bellifontains et de votre Ministère. En tant que Conseillère municipale, je n’ai, à aucun moment été contactée, ni en amont pour m’avertir de l’éventualité ou de l’imminence de cette démolition, ni à la suite pour me l’expliquer. Le Maire a compromis par son impéritie et sa volonté de dissimulation le travail des conseillers municipaux.
J'ajoute, à titre surabondant, que le programme sur lequel le Maire de Fontainebleau s'est fait élire en mars 2008 n'a jamais prévu de donner un  mandat à son Conseil municipal pour mettre en œuvre ce projet et notamment cette démolition. S'il souhaitait vraiment la réaliser, il aurait fallu être plus démocrate.

Je reste donc à votre disposition pour vous apporter toute précision de nature à rétablir une vérité qui semble désespérément avoir disparue de la Mairie de Fontainebleau et le cas échéant la contradiction à mon collègue.

 Je vous prie d’agréer, Madame le Ministre, ma haute considération.

Monique FOURNIER
Conseillère municipale de Fontainebleau

Copie :
- Préfecture de Seine-et-Marne


La lettre de Monique Fournier au Ministre de la Culture du 11 mars 2013
(cliquez pour mieux voir)


 La lettre du Maire au Ministre de la Culture du 7 mars 2013
(cliquez pour mieux voir)